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Fonction publique : conséquence de l’annulation d’un licenciement pour insuffisance professionnelle pour défaut de motivation

L’annulation par le juge administratif d’une décision de licenciement d’un agent stagiaire en cours de stage pour insuffisance professionnelle en raison d’un défaut de motivation implique la disparition rétroactive de l’éviction de l’agent.

La question se pose alors de savoir si cette annulation implique une reconstitution de la carrière de l’agent, sa titularisation voire son indemnisation.

Une réintégration purement juridique :

La jurisprudence considère que l’annulation du licenciement d’un agent stagiaire n’implique pas la titularisation de l’intéressé mais une simple réintégration juridique qui impliquera une nouvelle analyse de sa situation

« Que l’autorité de chose jugée s’attachant à l’arrêt du 23 mars 2009 qui a annulé la décision mettant fin à son stage au motif que l’abandon de poste qui la motivait n’était pas établi n’impliquait pas sa titularisation mais uniquement sa réintégration en qualité de stagiaire jusqu’à ce qu’il fût statué sur sa situation ; que, par suite, la cour n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que l’arrêt du 23 mars 2009 n’impliquait pas la titularisation de Mme B…; que si la cour a dénaturé les faits de l’espèce en affirmant que l’intéressée n’établissait pas avoir accompli une durée de stage excédant la durée légale, elle ne pouvait en tout état de cause, ainsi qu’il vient d’être dit, qu’enjoindre au centre hospitalier de la réintégrer en qualité de stagiaire jusqu’à ce qu’une décision soit prise sur sa situation » (C.E., 29 décembre 2014, n°369300).

Voir également en ce sens :

« 5. Considérant, d’une part, que l’annulation d’une mesure de licenciement en cours de stage d’un fonctionnaire stagiaire n’implique pas nécessairement, à titre de mesure d’exécution, qu’il soit procédé à sa titularisation ; que c’est dès lors à bon droit que le tribunal a enjoint au recteur de l’académie de Grenoble de seulement réexaminer la situation de MmeA… ; » (CAA Lyon, 20 avril 2017, N°15LY02680

Rien n’interdira donc à l’administration de reprendre une nouvelle décision de licenciement dûment motivée par l’insuffisance professionnelle de l’agent :

« Considérant qu’il résulte de l’instruction que, consécutivement à l’arrêt de la Cour de céans et postérieurement à l’introduction de la demande de M. X tendant à obtenir l’exécution dudit arrêt, le maire de Guebwiller a pris un nouvel arrêté en date du 8 octobre 2003 prononçant le licenciement de M. X pour insuffisance professionnelle à compter du 1er octobre 1997 ; que, d’une part, qu’il ressort des termes de l’arrêt précité, devenu définitif, que M. X a fait l’objet d’une mesure de licenciement en fin de stage consécutive à un refus de titularisation ; que, dès lors, compte tenu du motif d’annulation retenu par le juge d’appel, le maire de Guebwiller n’était pas tenu de titulariser l’agent évincé mais seulement de le réintégrer juridiquement aux fins de réexaminer ses droits à titularisation à la date de la décision annulée ; que l’annulation pour défaut de motivation de l’acte attaqué n’interdisait pas au maire, sous réserve de satisfaire aux exigences de forme imposées par l’arrêt, de prendre une nouvelle décision de licenciement fondée sur l’insuffisance professionnelle de l’agent ; que cette nouvelle mesure de licenciement fait obstacle à la réintégration effective de l’intéressé dans les effectifs de la commune ; que, d’autre part, eu égard au caractère précaire de la situation des stagiaires de la fonction publique, qui n’ont aucun droit à la titularisation, M. X ne saurait en tout état de cause se prévaloir d’un droit à la reconstitution de sa carrière ; qu’enfin, en l’absence de service fait, M. X ne peut prétendre, sous la forme de rappels de traitement, au paiement des rémunérations dont il a été privé depuis son éviction ; » (CAA Nancy, 2 décembre 2004, 04NC00277)

 

Une indemnisation limitée aux troubles dans les conditions d’existence

En application de la règles du service fait l’agent qui, par définition, n’a pas travaillé pour la collectivité durant sa période d’éviction ne peut pas prétendre au paiement des sommes qu’il aurait dû percevoir s’il était resté en poste.

Autrement dit, en l’absence de service fait, l’agent illégalement évincé n’a pas droit au rappel du traitement non perçu, mais à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Tout au plus l’intéressé pourrait donc prétendre à être indemnisé des troubles dans ses conditions d’existence.

Encore faudra-t-il qu’il démontre la matérialité de son préjudice et qu’il disposait de chances sérieuses d’être titularisé :

« Considérant qu’eu égard au comportement fautif de Mme BOUZAR, qui est demeurée absente de son service de la fin novembre 1994 au début du mois de mai 1995 sans fournir le moindre justificatif de son absence et n’a pas répondu aux relances de son administration avant que son traitement ne soit interrompu, la requérante n’est pas fondée à prétendre au bénéfice d’une indemnité à raison de la privation de son traitement d’avril 1995 à septembre 1995 ; qu’elle ne saurait davantage demander réparation des troubles dans les conditions d’existence qu’elle aurait subis du fait qu’elle n’a pas été admise à renouveler son stage, dès lors qu’elle n’avait aucun droit à titularisation ou à renouvellement de son stage et ne justifie pas qu’elle aurait perdu, à raison de sa révocation, des chances sérieuses de bénéficier d’un tel renouvellement ; » (CAA LYON, Chambre 3, 29 Mai 2000 – n° 98LY00455)

 

Jérôme MAUDET

Avocat